PARLONS VRAI ! Quoi, ma gueule ?

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Mais pourquoi l’a-t-on tant aimé ? Que s’est-il passé pour que Belmondo accède, à l’issue d’une vie cinématographique riche et bien remplie, au statut d’icône populaire auprès de ses pairs et du public ? La réponse tient peut-être en cette phrase proposée par Emmanuel Macron, à l’occasion de l’éloge funèbre qu’il prononçât quelques jours après la mort de l’acteur : « Belmondo c’est un peu nous, en mieux ». Traduction : on a tous quelque chose en nous de Belmondo, et cette partie de nous-même est peut-être même ce qui, dans ce qui nous constitue, est à la fois le plus français, et le plus désirable. Le fait n’était pas gagné d’avance : Belmondo, on le sait, c’était d’abord une « gueule ». Et il est un lieu commun que de dire que l’acteur n’était pas un « canon de beauté ». La désirabilité de Belmondo, il faut donc la chercher ailleurs. Certaines voix ont rapidement émis l’idée qu’elle puisse procéder d’une « adéquation » de Belmondo avec son époque, l’acteur ayant pu prendre en charge la survivance d’une France populaire, joyeuse et mâtine – que le libéralisme et la mondialisation étaient en train de mettre à bas. Belmondo, résistant, contre l’histoire en marche. Et donc : Belmondo non pas désirable en lui-même, mais désirable parce que gardien d’un « morceau de France » lui-même désirable, et désiré… Bon.

Permettez-nous une théorie plus audacieuse : et si Belmondo n’avait pas été précisément l’incarnation du « Français », mais davantage celle du « mâle français » ? Voyou, légèrement macho, bagarreur, sainement révolté, probement hors-la-loi : voici que malgré sa gueule Belmondo endosse le rôle de « l’homme à femmes », ce qui dit à la fois quelque chose de ce qui peut être désirable chez l’homme, et désiré par la femme. On tente l’analogie Gainsbourg, qui, malgré ses frasques et sa « tête de chou », a lui aussi atteint la dignité de « french sex symbol » ? On n’émettra aucun jugement de valeur, mais l’on conclura sur l’idée que l’argument, s’il est jugé recevable, est piquant. Notre époque n’est-elle pas, justement, celle de la déconstruction du mâle ? Comment pourrait-elle être celle-ci, quand, « en même temps », l’on porte aux nues l’un de ceux qui est la parfaite contre-illustration de cette déconstruction ? Paradoxal ? Oui. Mais pas inquiétant pour autant, le lieu du paradoxe étant aussi, comme toujours, celui de la pensée en train de se faire… Si vous n’aimez pas cela : allez vous faire foutre.